[Peu après la mi-janvier 1910] 1

Mon cher Funinels

Merci gentoulesses. Cher Genstil je souffre bien moins que le pauvre Buncht quand il avait moschant abcès dans gorge et suis seulement trop douillet. En tous cas cher Genstil dans une crise aussi forte je ne puis recevoir nul médecin qui d'ailleurs ne ferait que s'esquinter et attendre qu'elle soit finie 2. Je vous assure que ç'aurait été aussi l'avis de Maman.

Je vous écris très mal placé d'où illisiblement mais je ne veux pas remuer trop.

Merci cher Genstil, si vous voyez les Veuves chez qui je fus avant-hier 3, les Caillavet, Flers etc. attendrissez-les sur mon sort pour que cela m'évite des visites.

Adieu cher Buncht de mon cœur ne peux rien vous dire quand vous boir. N'ayant réussi qu'à centupler ma crise avec le trional, fumages, etc. je viens d'essayer de la Caféine et peut'être dans peu d'instants serais-je calmé. Mais non pour cela visible encore. Car je suis vraiment trop mal. Et il a fallu le désir de répondre â Buncht, et la peur qu'il m'envoie médekin que je n'aurais pas reçu pour faire cet effort d'écrire. Adieu cher Genstil 4.

Soyez sûr que si la caféine ne me calme pas je ferai venir Bize pour petite piqûre mais je crois que cela va finir avec caféine.

1. Hahn 177-178 (n° CXVII), texte tronqué. La date de cette lettre est incertaine. Les allusions aux Caillavet, à l'impossibilité où Proust se trouve de recevoir son médecin (note 2 ci-après) ou Reynaldo, à la visite qu'il a faite " avant-hier " chez Mme et Mlle Lemaire (note 3), semblent situer cette lettre vers le même soir que la lettre 9 à Mme de Caillavet.

2. Cf. la lettre 9 à Mme de Caillavet ci-après: " [...] je suis dans les crises, les fumigations. Je ne laisse entrer personne, pas même mon médecin. "

3. Cf. la lettre 9 à Mme de Caillavet ci-après: " L'autre jour je suis sorti à une heure et suis allé frapper chez Me Lemaire. Je ne l'avais pas vue depuis un an. "

4. Au lieu de signer sa lettre, Proust esquisse ici un profil au nez démesuré.