Marcel
Proust
Lettres à Reynaldo Hahn
[Mai 1905?] 1
Mon cher Genstil
Croyais que viendriez pour parler Hesther. Sousfrant, incertain si pourrai ou si pas. En tous cas ayez gentillesse escrire 1° si c'est bien aujourd'hui, et si c'est bien la dernière répétichon [;]2 2° à quelle heure au plus tard il faut que je soie chez Me de Guerne et où demeure icelle 3 (cela m'est égal d'entrer seul) [ ; ] 3° Si (bien entendu) cela ne souffre aucune difficulté et ne peut être qu'agréable aux Guerne. Si non non (il serait trop faschant que je prenne si extrême fatigue pour faschant Guerne [;] 4° si je peux ne pas vous faire prévenir au cas où n'irais pas car dans ce cas, dormirai. Si j'y vais, que vous me permettiez de ne vous faire prévenir qu'à quatre heures. -
Résumez moi votre soirée de dimanche de onze heures à une heure. Vous Hexpliqueraihhhh.
BULS
1. Coll. M. le docteur Jean Heitz. Hahn 77-78 (n°XLV) (1956) ; dessins, Cahiers d'inédits 3 (Ottawa) (1972), p. 158. Sur papier de grand deuil " Ducal Crown ". à la deuxième page figure un dessin intitulé : L'Annonciation vitrail de Laon (très josli). A la troisième page, dessin intitulé : L'Annonciation/Vitrail de Lyon (très vilain)..a remarquer combien dans les deux vitraux la Vierge a l'air faschée de la nouvelle que lui apporte l'ange avec des gestes dénués de simplicité. - Ce billet date apparemment du mois de mai 1905 : voir la note 2 ci-après.
2. Cf. la lettre à Montesquiou datée du Mardi soir [16 mai 1905], ci-dessus, où Proust énumère, parmi les concerts de Reynaldo Hahn auxquels il n'a pu assister: " je n'ai pu aller à une seule de ses Esther chez Mme de Guerne ". Il s'agit sans doute des répétitions pour le concert qui aura lieu le 8 juin 1905, dans l'hôtel de la comtesse René de Béarn. 22, avenue Bosquet, au bénéfice des Italiens pauvres de Paris. Le Figaro du 3 mai 1905 annonce, à ce propos : " Les chœurs d'Esther, de M. Reynaldo Hahn, seront chantés avec orchestre et sous la direction de l'auteur, par des dames du monde. Les solistes seront la comtesse de Guerne et la marquise de Vezins. " Cf. L'Echo de Paris, 10 juin, p. 2.
3. La comtesse de Guerne, née Marie-Thérèse de Ségur, à laquelle Proust consacra un de ses salons, celui qu'il a fait paraître dans le Figaro du 7 mai 1905. (Chron. 62-72.) Il y écrit : " Depuis la mort de son père, le marquis de Ségur [...], la comtesse de Guerne habite avec son mari le comte de Guerne, une gracieuse demeure de l'avenue Bosquet - c'est là qu'on entendit pour la première fois les chœurs d'Esther, ce que M. Reynaldo Hahn a peut-être écrit jusqu'ici de plus beau [...] " Les Guerne demeuraient au 3 de l'avenue Bosquet. Mme de Guerne mourut le 11 mars 1933. (S H-L 1936, p. 1122.)