Marcel Proust
Lettres à Reynaldo Hahn
[Le
jeudi soir 31 janvier? 1907] 1
Est-ce
que vous êtes 2 encore phasché, mon Bunchtbuls? Pauvre
Buncht pas croyez que j'ai[e] de moi une idée extraordinaire sous mon " apparente
modestie ". Hélas, Niduls, je voudrais bien, mais
j'ai certainement de moi une moins grande idée qu'Antoine ne peut avoir de lui-même
ou Jean Blanc 3. Je serais peut'être un peu moins
malheureux sans cela. Du reste tout le monde est phasché contre moi ce soir. Cardane
a dit à Ulrich 4 : " S'il croit que quelqu'un lira son article en dehors de
lui et des quelques personnes qui le connaissent 5 ! " C'est du reste Bérité 6. Hasdieu, binuls, ne soyez pas tellement phasché
contre B. qui ne sait plus comment doit être avec vous devant hauterch, car s'il est très b. vous trouvez que trop et que
moschant pour les autres, et s'il dit que et que vous
trousvez que et que. Et que et que. Je voudrais pour
vous desrider et desfascher
vous écrire mille genstillesses, mais j'ai une crise
qui commence et dans la promesse des heures cruelles fait déjà taire mille maux.
Hasdieu et Genstil 7
2.
Ms : vous êtes, mots ajoutés en interligne.
3.
Rappelons qu'Antoine Bertholhomme est concierge, Jean Blanc valet de chambre. Voir
Cor, II, 218, note 5 et passim.
4.
Voir Cor, III, 269, note 7.
5.
Il est question ici, semble-t-il, de l'article Sentiments filiaux d'un parricide,
qui a paru dans Le Figaro du vendredi 1- février 1907. A l'égard de cet article,
Proust exprime une même humilité dans sa lettre du 3 février 1907 à Robert Dreyfus
ci-après.