[Cabourg, peu après le 18 juillet 1908] 1

Mon petit Bunchtniduls

Je vous ai escrit longue lettre et puis ne sais où 2. J'ai mille choses à vous rasconter. Et plusieurs à vous dire de la part de Montesquiou et sur lui. Ce ne sont pas tout à fait les mêmes. Il croit que vous ne l'aimez pas et espère que vous ne lui en voudrez pas d'avoir publié vos lettres dans son livre sur Yturri 3. Et de fait elles ne sont qu'agréables pour vous, je les ai lues.

Genstil pourriez-vous par retour du courrier me dire les titres des principaux ouvrages de Julia A. Daudet 4. Je suis fatigué moschant. Si vous passez place Beauvau demandez donc chez un antiquaire qui n'est pas Doucet 5 s'ils ont des perroquets de porcelaine Louis XV vrais ou supposés tels comme ceux qu'ils ont vendu[s] à Mlle Dorziat 6 il y a déjà " beau temps " et ce que cela coûte. Vous ne viendriez pas Cabourg genstil 7 ? Ecrivez-moi par radiographie 8 [.]

Reçois à l'instant nouvel envoi. Folie! Vous récrirai. Vous êtes trop moschant. Et me faites rébouler neuf heures lettre recommandée quand j'avais pris trional à huit. D'où crise. Ne m'envoyez jamais lettre recommandée.

Je vous ai escrit sur 750 francs reçus et bien fasché 9. Mon Bininuls attend quoi pour comprendre que ce serait petite consolation de ma vie qu'il me laisse agir avec lui comme un vieilch cousin. En tous cas arrêtez ici cette prétendu [e] restitution.

1. Hahn 155-156 (n° CI). Cette lettre semble suivre de peu l'arrivée à Cabourg, et daterait de peu après le 18 août 1908 nouvelles allusions au livre sur Yturri (note 3 ci-après), aux 750 francs (note 6), la demande des titres des ouvrages de Mme Daudet (note 4).

2. Lettre égarée? ou peut-être la lettre de cinq pages que nous datons du lundi soir 22 juin 1908 ci-dessus. Ou la lettre 101?

3. Cf. la lettre 86 du même au même ci-dessus que nous datons des premiers jours de juillet 1908.

4. Proust a l'intention de les citer comme " carte de visite " dans son article sur Le Chemin mort de Lucien Daudet. Voir la note 3 de la lettre 107 à Lucien Daudet ci-après.

5. A. Doucet et fils aîné, antiquaires, rue du Faubourg Saint­Honoré, 94. Il y avait en effet, non loin de là, J. Marchand, curiosités, rue du Faubourg Saint-Honoré, 90 et rue des Saussaies, 2. P. Hach. 1910.

6. Voir Cor, VII, 38, note 4.

7. Le Figaro du 12 août 1908 annonce, p. 5, sous la rubrique Déplacements et Villégiatures des Abonnés du " Figaro " [...] "  M. Raynaldo [sic] Hahn, à Versailles."

8. Proust aime cette idée. Dans Le Temps retrouvé, on lit "J'avais beau dîner en ville, je ne voyais pas les convives, parce que, quand je croyais les regarder, je les radiographiais. " III, 719.

9. Voir la lettre 101 du même au même ci-dessus.