Marcel Proust
Lettres à Reynaldo Hahn
GRAND HOTEL
CABOURG
[Juillet 1908] 1
Mon petit Bibibuls
Ce soir je donne dîner! Louisa, sa sœur 3, Loche 4, Christiane 5, un ami de Loche
nommé M. Mahot de la Quérantonais 6 et Alexandre de Neufville 7 (et Pierre du Breuil)
8 [.] N'en parlez pas si on vous parle de moi, car on concluerait que je vais bien, ce qui est faux et me causerait des fatigues. Je suis malheureux
de vous demander toujours quelque chose. Mais si vous pouviez sans tarder recevoir Fortunato Luzzato 9------
Après cela pourrez-vous encore me dire
sincèrement
Va je ne te hais
point 10 !
Pour les perroquets je me demande étant
donné qu'il m'en faudrait quatre (et si vous saviez pour qui vous m'étrangleriez)
si Hopillard n'aurait pas pour la moitié du prix aussi
bien 11. Ce n'est ni pour Viollet le Duc ni pour Emile
Mâle et peut'être n'y verraient-ils que du feu.
Genstil retrouve ce début de lettre écrit
il y a dix jours je n'y comprends absolument rien[.]
Je vous l'envoie sans savoir de quoi il parle avec mille tendresses.
B.
1. Hahn 156-157 (n° CH). Ce " début
de lettre " suit d'assez près celle que nous situons peu après le 18 juillet
1908. allusions aux " succès
d'Angleterre " (note 2 ci-après), aux perroquets (note 11), à Fortunato Luzzato (note 9).
2. Le destinataire avait chanté le 10
juillet 1908, dans un concert à Covent Gardens, Londres. Voir la lettre du même au même que nous
datons du lundi soir 22 juin 1908, et sa note 4, ci-dessus.
3. La sœur de Louisa
de Mornand en question ici est Mme Cottier, née Suzanne Montaud, qui
prenait au théâtre le pseudonyme Jane Moriane. Cf. la lettre 105 à Robert de
Billy ci-après.
4. Prince Léon Radziwill. Cf. Cor, IV,
436, note 3.
5. Christiane Lorin, l'amie de Radziwill.
Voir Cor, VII, 194, note 6.
6. Il s'agit apparemment de Jean Mahot de la Quérantonnais, qui demeurait
chez Mme G.-E. Mahot de
la Quérantonnais, née Mocquard, avenue des Champs-Elysées, 104. Tout-Paris,
1908, p. 381.
7. Voir Cor, VII, 213, note 9.
8. Voir
Cor, 111, 288, note 10.
9. Fortunato
Luzzato, né à Fiume en 1855, décédé au même endroit vers 1930,
avait fait ses études de musique au Conservatoire de Vienne sous Gustave Mahler.
Il était compositeur de musique de chambre et le professeur de piano de Mme
Lionel Hauser. Le mari de cette dernière avait demandé à Proust s'il pouvait
faire recevoir Luzzato par Reynaldo Hahn, sans doute
dans l'espoir de faire jouer de ses compositions.
10. Voir la note 2 de la lettre 52 à Emmanuel Bibesco ci-dessus.
11. Sic. Il s'agit de la maison Hopilliart et Leroy, antiquaires, 12 et 16 rue des Saints-Pères. P.-Ilach.
1910, p. 319. Au sujet des perroquets, voir la lettre 102 ci-dessus.