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Robert de Montesquiou
DOUZE STATIONS D'AMITIE |
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V CHAPITRE CINQUIÈME CORRESPONDANCE Ego Parlant, un jour, de je ne sais quel point de comparaison,
Flaubert s'écrie avec conviction : " C'est ça qui renfonce l'orgueil ! " Ainsi fais-je avec sincérité, en passant à ma pauvre
correspondance. Sans doute, elle aussi, eut sa force, et sa douceur. L'agrément,
l'encouragement qu'elle apportait, nous venons d'en voir les preuves ;
elles suffisent à la justifier. Des grâces, il est probable qu'elle en eut ; mais,
encore une fois, cela n'importe pas. Je l'ai dit, il s'en peut rechercher
d'équivalentes, dans mes livres, pour ceux qui leur trouvent de l'attrait.
Or, tel n'est pas le dessein de cet ouvrage, qui n'a aucunement pour but
de faire valoir mon style, mais, uniquement, de rendre hommage à Celui
qui n'est plus. Je me bornerai donc à un petit nombre d'extraits, choisis
parmi ceux qui, d'une part, témoignent de quelle noble fibre était le
lien qui nous unissait, en quelle haute estime je n'ai jamais cessé de
le tenir, et de quel réconfort fut, pour moi, son incessant appui. D'autres
citations prouveront, en second lieu, que j'ai su ne pas me montrer indigne
du privilège d'un tel sentiment, par le soin que, sous de mortelles menaces
graduellement accrues, j'en ai pris sans relâche, jusqu'à la dernière
heure - et par delà ! A quelqu'un qui me parle de cet Ami avec un intérêt
sympathique, j'envoie ces mots en guise de lettre de présentation : " L'Ange Gabriel, comme vous l'appelez, plus véridiquement
que vous ne pensez, est un envoyé d'En Haut, ayant pour mission d'aider
à l'œuvre d'un intellectuel fils de Tobie. Sa présence communique l'ardeur
de ma cause ; et ceux qui l'approchent sont bien près de m'apprécier.
Donc, gare à vous ! " L'hyperbole de cette lettre de présentation, évidemment
peu conforme aux expressions habituelles, n'est qu'apparente ; j'en professe
l'esprit, et je retrouve, à chaque page de ma correspondance, des variations
sincères et senties sur ce thème sentimental : " Très cher ami, seul fidèle, dévoué, zélé collaborateur,
je sais que votre assistance sine qua non, ne me fera pas défaut
tant que vous vivrez. " - " Les bonnes heures, dans la vie, sont celles
où nous luttons, fût-ce douloureusement, mais d'un effort puissant, pour
la réussite d'une œuvre que nous croyons inspirée. Et, cela, je ne le
ressens bien qu'avec vous. Donc, in nisu et conatu, Salve ! " -
" Merci, en hâte, pour le verbe chaud et coloré, qui a le don de me rassurer
et rasséréner. " - " Je reçois votre bel et fécond mot, qui m'émeut infiniment,
et me fait monter aux yeux les larmes du cœur. Nous pourrons nous vanter
d'avoir connu, dès ici-bas, les plus nobles jouissances morales de l'attachement
et du zèle. " - " Je termine en vous disant : courage ! - pour vous
en donner peut-être - et, pour en prendre, indubitablement. " - " La récompense,
après les travaux, et les peines prises, est de se retrouver avec ceux
qui, au lieu de nous amoindrir, nous apparaissent justement comme une
amplification de notre moi. " - " Merci pour le joli objet que je reçois
de vous, et dont le plus grand charme réside, pour moi, dans la joie intense
que vous a, tel que je vous connais, évidemment procuré l'occasion de
me l'offrir. " - " Je parle de vous avec Gandara et nous tombons d'accord
sur la vie que vous donnez aux choses, sur votre don de tout extérioriser,
sur l'ascendant que vous conservez à l'égard de ceux qui ont, une fois,
subi votre emprise, et sur la peine qu'on éprouve à se déshabituer de
vos sortilèges. - Voici un texte qui résume de façon très expressive,
et fort exacte, mon impression sur ce point. Il est d'un auteur contemporain:
" J'eus comme un vertige quand je me retrouvai seul ; je me rappelais
bien les mots ; mais je sentais que le sorcier avait emporté le charme
qui les faisait réussir. " - " Vous auriez fait parler bien des choses,
que je laisse muettes, par fatigue, et par dédain. Quand je m'y résigne,
c'est parce que vous l'auriez trouvé bon. Ce qui serait facile, avec vous,
n'est plus que possible, sans vous, et, encore, à la condition d'invoquer
votre nom ! C'est dire que votre absence diminuera beaucoup de ma communication
avec la vie. " " Je reste bien ému d'avoir trouvé votre lettre, et
de l'avoir lue, à l'abri de mon arbre qui, à moi aussi, m'est " ombrage,
volière et consolation " selon la belle expression de Doña Genoveva ".
- " Ainsi donc, nous voilà tous les deux, à trente jours de distance,
chacun sous notre arbre de fraîcheur, de mélodie et de mélancolie. Moi
aussi, je suis inconsolable de la perte de votre lettre qui me destinait
le récit, j'en suis sûr, poignant, d'une minute, entre toutes, ineffable.
- C'est donc vrai, en dehors même des tableaux : la vieille mère, l'enfant
qui revient, les cargaisons déballées, et les témoins aux yeux écarquillés
devant les objets de provenance lointaine. Banal, en peinture, c'est touchant,
en réalité. " " Le récit de votre chasse aux perroquets me fait penser
aux " plagiaires de la foudre " de Villiers de l'Isle-Adam, avec, en plus,
pour votre narration, la supériorité de la chose vue. J'aime aussi beaucoup
cet oiseau Kétupy dont vous me parlez, et qui me parait descendre de l'oiseau
Bulbulhezar des nuits arabes, et de la Huppe de Salomon. Que de beaux
contes vous pourriez ainsi me faire si vous vouliez vous en donner la
peine, rien qu'à regarder, et à transcrire ! Vous avez appris à voir.
Et, pour le style, les tableaux vous le dictent ou plutôt l'extraient
tout naturellement de votre exaltation en leur présence et à leur vue.
De vrai, combien peu de Français s'exprimeraient en leur langage, comme
vous le faites présentement. Vous y montrez de l'esprit, de la grâce,
de la vivacité, du tour. Arrêtez-vous ! Avec un peu plus de talent, personne
ne vous lirait plus ; tandis que je montre de vos lettres à de nos amis,
qui en sont tous charmés. " - " Ce serait un beau bénéfice du chagrin
de l'absence que l'art d'embellir les retours, de jouir des présences,
et, sans y mêler d'amertumes, jamais ! - Oui, jouir des présences, qui
ne dureront pas toujours (on n'y pense pas assez !) et qui même, bien
au contraire, peuvent toujours cesser, dans l'instant ! " - " Hélas,
si vos rebellions m'irritent, vos douceurs m'attristent, et je crains
bien, en toute modestie, et pareille fierté, qu'il ne me soit pas donné
de vous voir heureux, de mon vivant, si vous attendez, et s'il vous faut,
pour cela, que le traitement de la vie soit à l'unisson de ce que vous
appelez mon mérite, selon l'opinion que vous vous en faites, dans des
heures qui, je voudrais le croire, ne sont pas trop illusionnées. "
- " C'est hélas ! du triste et froid milieu d'incompréhension maussade
et hostile qu'a toujours été, pour moi, l'intérieur de famille, que, je
vous envoie mon salut affligé. A mesure que mon effort m'a donné droit
à d'autres traitements, ce malaise devient plus intolérable, quand je
ne réussis pas à m'en évader violemment par l'exaltation du travail, qui
ne me favorise pas, en ce moment. Ne pensez pas que je prenne rien au
tragique, mais je subis la gêne pluvieuse de l'indifférence, à la fois
réelle et feinte, envers tout ce qui, pour moi, est tout. J'arrive plein
de foi et de force, de zèle et de courage, d'espérance et d'amour ; puis,
la cendre fine, en même temps que grossière, du dédain environnant, pour toutes les nobles choses auxquelles
j'ai consacré ma vie, change, comme une neige, la forme de tant de beaux
contours, au point de faire presque douter de leur réalité, et de leur
rêve. " Soyez donc béni d'être venu, du fond du lointain,
comme un Raphaël, cher Gabriel, pour me prodiguer l'ardeur que mon héritage
m'a refusée, et me réchauffer l'exil, dont mon pays m'a payé. " - " Rien
à ajouter à ce que je vous ai écrit, si ce n'est qu'entre des peines infinies,
une chose nous reste : un attachement incomparable. " Ne le privons pas de se manifester, et de faire
oublier le reste !... " Survient une aventure de duel. Je me bats. L'Ami est
absent, et j'ai lieu de m'en applaudir, le précaire état de sa santé ne
lui permettant pas d'aborder, de sang-froid, des circonstances pour lui
pleines de frisson. A la veille de la rencontre, dans cette calme et clairvoyante
lucidité qui accompagne les graves évènements pour ceux qu'ils ne troublent
point, je trace ces lignes, qui doivent être adressées à Yturri, en cas
d'accident mortel. Lorsque le sort en décide autrement, ce qui aurait
fait pleurer, fait un peu sourire ; je ne me le dissimule aucunement.
Néanmoins, quand l'absent revint de son voyage et que, longtemps après,
il prit connaissance de ce factum, je vis tomber de ses yeux deux larmes
silencieuses qui reparlent et reperlent dans mon souvenir. " Si cette lettre vous est remise, cela voudra
dire qu'il m'est arrivé malheur, et que, d'une faible cause peuvent résulter
de graves effets. Alors, n'en concevez pas trop de tristesse, qu'il vaudrait
mieux remplacer par de l'action utile. Prenez soin de ma mémoire. J'ose
croire qu'elle en vaut la peine. Les publications auxquelles je vous demande
de veiller, aideront, sans doute, à la faire mieux connaître, et j'espère
qu'on vous en saura gré. Je serai parti en laissant la moitié de mon œuvre
inachevée. Et c'est cela seul que je regretterais de ce monde, avec votre
dévouement et votre amitié qui l'ont presque uniquement embelli, pour
moi (1). Encore merci pour votre affection de vingt ans. La mienne, pour
être invisible, n'en sera pas moins sensible et ne vous fera pas défaut. " L'issue de l'événement ne donne pas lieu à l'envoi
de cette lettre. La correspondance continue à s'échanger entre nous avec
ses commentaires sur cette complication récente. A la suite d'un envoi
de lui, sur ce propos, je réponds : " Vous continuez à battre le record des expressions
frappantes par leur justesse sincère et simple. C'est votre force et celle
que vous donnez. " Je vous assure de toute ma tendresse dont je connais
maintenant l'étendue et l'énergie. - Je ne savais pas jusqu'à aujourd'hui
combien vous m'étiez cher. Croyez que toutes ces formules ont été appréciées par
moi, à leur valeur véridique et profonde. Cela peut sembler facile à trouver.
C'est une erreur. Il y faut une âme. On en rencontre de moins en moins.
Il n'est jusqu'à : je vous serre dans mes pauvres bras ! qui
ne m'ait fort ému. Vous savez bien que de leur noble encouragement, je
tire foi et espérance. " Mais qu'est-ce que ce duel d'une heure, auprès de celui
qui se prolonge des jours et des années entre ce courageux patient, et
un mal indomptable ? Voici quelques-unes des plaintes qu'il m'arrache,
à mesure que sa cruelle lutte s'accentue : " On n'a pas deux amis. Contentons-nous chacun du nôtre,
dans ce monde présent et dans le monde futur ! " " Donnez-moi de vos bonnes
nouvelles, sans lesquelles je ne puis être heureux. " - " Vous savez que
nous sommes associés pour le temps et l'éternité, et sur les plus augustes
principes du monde. " - " Il est possible (et de telles craintes
me troublent jusqu'au fond de l'âme !) que des dangers menacent votre
précieuse tête, déjà trop éprouvée, et, par suite, la mienne. Vous savez
que la première m'est au moins aussi chère que la seconde ; et je n'oublierai
jamais que, seul, entre tous, depuis si longtemps, en dépit des mauvaises
heures, vous m'avez été bon, fidèle et adjuvant. " - " A la moindre alarme,
je sens mieux combien je vous suis attaché, que cependant, je sais toujours
bien. " - " Ma pensée est uniquement préoccupée de vous. " -- " Ma
consolation est de m'être effacé depuis cette recrudescence de vos maux,
et de n'avoir rien négligé pour vous donner satisfaction et diminuer votre
malaise. " - " L'accord distant de nos cœurs est, je le sais, et je le
sens, pour vous, comme pour moi, le seul réconfort, et la seule douceur.
" - " Vos lettres me font, à la fois, du bien et du mal ; et quand j'y
lis certain passage sur " deux voyageurs bien portants ", je souffre à
penser que vous ne parlez pas de vous. " - " La vue de votre écriture
(quoi que vous en disiez, révélatrice, assez bonne et calme), m'a pénétré
d'une émotion intime et profonde, et l'une des pierres qui m'écrasaient
le cœur a pris des ailes et s'est envolée. Cela ne fait pas encore un
cœur bien joyeux ; mais, souffrir moins, c'est décidément une des seules
façons d'être heureux qu'il y ait au monde. Je n'ai qu'une idée, c'est
de vous témoigner, cette fois, et désormais, que mes propos ne sont pas
vains, quand ils formulent l'assurance de mon dévouement ; que l'emportement
des malentendus a, seul, pu donner à penser que je ne tenais pas mes promesses,
et qu'il faut croire à mes protestations quand elles disent que votre
santé, votre salut et votre contentement me sont plus chers que tout.
" - " Bien cher ami, plus cher, en raison de mutuels chagrins - dire que
votre lettre ne me cause pas une tristesse infinie, ce serait pis que
dissimuler, ce serait mentir. Les quelques pages souriantes qui me sont
venues de vous, au cours de ce triste exode, m'ont fait trop de plaisir,
pour que celles-ci ne me fassent pas autant de peine. Je sais, nous savons,
la loi glorieuse et la mystérieuse nécessité des épreuves. Mais je voudrais,
pour vous, encore un peu de bonheur sur la terre. " " Aujourd'hui, Dimanche des Rameaux, je vous écris.
Votre silence me désole. J'en devine les causes, et j'en éprouve les effets.
Que c'est triste ! Affection partagée, sans réserves et sans bornes. De
mon côté, je voudrais étendre, sous vos chers pas fatigués, un tapis de
roses sans épines. Du vôtre, que ne souhaitez-vous pas de m'offrir ? Et
cependant, voici qu'à la veille du retour, il faut l'empoisonner par des
doléances. Du moins, gardons-nous de rompre ce fil de confiance et de
confidence, en dehors duquel tout se délie, et par qui, tant de fois,
l'espoir fut rattaché ! " " Ah ! mon ami, mon seul ami, je n'en doute pas,
de votre part, et vous le savez, de la mienne : les clefs d'une ville
dans laquelle il n'y aurait que du bonheur, voilà ce que nous voudrions,
l'un et l'autre, nous présenter sur un plateau, à l'heure du revoir !
- Je souffre, en vous l'écrivant ; et, si j'en veux à la vie, c'est moins
des chagrins qu'elle m'inflige, que de celui, supérieur à tout, de vous
causer de la peine, au lieu de toute la félicité que je voulais vous donner.
Pardonnez-moi donc de vous émouvoir. Voilà des mois que, dans la mesure
du possible, je m'en abstiens systématiquement. Pardonnez-moi tout, et
donnez-moi ce à quoi je tiens par dessus tout (parce que cela m'aide à
conquérir le reste), votre unique affection ! " - " Ma pensée, attendrie
et triste, ne se peut détacher de vous. A tout hasard, il faut que je
vous le dise. Cela vous parviendra bien. " " Je comprends maintenant des choses : la détresse
qui s'est emparée de moi, inopinément, il y a quelques jours, à la suite
d'un songe où je vous avais vu mal. Cet écran (2) fait frémir, avec son
exactitude, car, vraiment, je n'avais pas plus de raisons de m'inquiéter,
ce jour-là, que la veille... et ma lettre d'hier vous aura néanmoins donné
le ton de mon affolement. Je lui préfère encore mon état d'aujourd'hui,
qui aspire, du moins, à une chose précise : vous revoir, vous soigner,
vous resauver!.. " Sans doute votre voyage vous aura fatigué, avec
tout ce camp volant. Mais souvenez-vous de New-York, de Versailles, où
vous étiez si souffrant ! Cela ne vous a pas empêché de vous trouver presque
bien, ici, à l'automne. " Cher ami, reprenez-vous, écoutez-moi, ne vous
découragez pas. Vous vous remettrez, et vivrez encore de belles, de bonnes
années, pour jouir, un peu, enfin, quelque jour, du repos gagné. J'EN
SUIS SÛR. " Vous savez bien que je ne puis pas me passer
de vous, et que la vie, sans vous, serait pour moi sans force et sans
charme. " Vous êtes une créature trop précieuse pour disparaître
avant d'avoir accompli toute sa mission. Je vous le répète : J'EN AI LA
CERTITUDE. Ainsi donc, sursunm corda, et spes ! Haut les cœurs
et l'espoir ! Il le faut. Dieu nous exaucera. Unissons-nous pour l'en
prier, et pour accomplir ce qui sied, en vue de cette fin ardemment souhaitée,
en toute la noblesse et la dignité d'une alliance dont nulle plus fervente
n'a jamais rapproché deux êtres. " Donc, ce matin, j'hésitais un peu avant d'ouvrir
votre lettre, craignant quelque reproche. Hélas ! que j'aurais mieux aimé
cela ! Ainsi donc, pendant que je m'évertuais à vous cacher ce qui aurait
pu vous troubler, vous en faisiez autant ! - Ce trait seul n'est-il pas
bien fait pour désarmer la destinée ? " " Voilà, cher ami, ce supplément de détails à ma lettre
de ce matin. Puissent-ils vous porter un peu de mon âme empressée et dévouée,
au-delà des jours ! " Puissent les paroles attendries qui sortent,
pour vous, de mon cœur, ensemble paternel et fraternel, en même temps
que les larmes de mes yeux, vous porter mon émotion, mais aussi consolation
et courage. Car, il en faut, pour réussir, et nous en AURONS, et nous
RÉUSSIRONS. " Souvenez-vous, comme vous étiez mal à New-York, puis
à Versailles, et, mieux, ensuite, en Auvergne. Donc, après Francfort,
vous irez encore là, et nous verrons bien. " " Je vous avais vu malade en songe; et cela n'avait
pas peu contribué à me troubler l'esprit. Encore une fois, excusez-moi
de ce qui a pu vous contrarier dans mes lettres. Je ne crains rien de
ce que l'on trouverait, pour vous, dans mon cœur, en l'ouvrant en deux. " " Quand je vous croyais relativement content et bien
portant, je pouvais penser à autre chose. Maintenant, c'est impossible. " En y réfléchissant, ce grand voyage n'aura sans doute
pas été raisonnable, bien fatigant. Francfort, alors, comme vous y aviez
songé, aurait probablement mieux valu. Mais vous rêviez soleil après tout
ce froid, et je n'ai pas été consulté. Quand j'ai, tout d'un coup, appris
votre départ, j'ai eu le cœur bien serré. Mais à quoi bon des réflexions
vainement rétrospectives ? Nous avons mieux à faire. " Pour le moment, j'attends la réponse de Robin. La
mort de la Duchesse d'Albe a dû le retenir. Il la soignait. On peut plaindre
ceux qui meurent, non ceux qui sont morts. C'est le passage qui est rude.
On ne peut pas souffrir plus que dans la vie. Et je le repète, la plus
cuisante de ces souffrances, c'est de ne pas pouvoir les épargner à ceux
qu'on aime. Rien ne peut se comparer à cela ! " Je vous ai dit, hier, mon regret de vous avoir écrit
comme je l'ai fait. C'était plus fort que moi. Dans le même temps, nos
deux cours éclataient. " Toute ma pensée est auprès de vous, et j'ai mal à
tout ce dont vous souffrez. Cela, vous le savez, devant Dieu, sans phrases,
devant Dieu qui m'entend et, j'espère, m'exaucera ". - " Je n'ai plus
de cœur à rien, mais j'aurai du courage pour tout. " Quant à vous, s'il vous est doux, et réconfortant,
de penser que vous avez un ami qui mourrait volontiers pour vous - et,
cela, comme il le dit, vous savez que c'est ainsi. " C'est aussi cette pensée qui le soutient. " (1) Suivaient des recommandations concernant des manuscrits,
et d'autres expressions de volontés. (2) C'est le nom que nous donnions à ce tableau sur
lequel se projettent et se déroulent les avertissements du sommeil, auxquels
nous avions l'habitude de prêter Vous m'êtes, en dormant, un
peu triste, apparu ; |
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